La guerre qui se déroule actuellement en Ukraine peut susciter des inquiétudes, voire des angoisses chez les enfants et les adolescents. Comment aborder ce sujet avec eux ?
Sophie Leroux, psychologue au Centre de réadaptation Marie Enfant, livre ses conseils.
« Nous vivons actuellement un stress pandémique. Notre tolérance à de nouvelles inquiétudes est donc diminuée. Il faut en tenir compte dans notre manière d’aborder la guerre avec les jeunes. »
1. Éviter d’exposer les enfants aux nouvelles alarmantes, aux images choquantes (violence, destruction massive, familles séparées) et aux discussions entre adultes, surtout si le jeune a moins de 7 ans ou est de nature anxieuse.
2. Choisir la façon d’aborder le sujet. Attendez que votre enfant vous pose des questions, surtout s’il a moins de 6 ans, s’il y a peu de risque qu’il soit exposé à cette information et s’il ne présente pas de changement dans son comportement (ex. : agitation, difficulté de sommeil).
Pour les plus vieux (à partir de 7 ou 8 ans), vous pouvez aborder le sujet par une question simple, par exemple « As-tu entendu parler de la guerre en Ukraine ? As-tu des questions ? ». Répondez uniquement aux questions posées et vérifiez la compréhension du jeune. Demandez-lui s’il a d’autres questions. Si vous ne connaissez pas la réponse, renseignez-vous. Il vaut mieux y aller graduellement pour que l’information soit assimilée.
3. Fournir des explications courtes et simples sur la situation actuelle de la guerre. Le fait de connaître et comprendre les faits est rassurant. Par exemple : « Le président russe fait la guerre en Ukraine parce qu’elle possède des richesses intéressantes (charbon, terres agricoles, gaz, blé) et qu’il n’accepte pas que ce pays soit devenu indépendant. » Vous pouvez préciser que les Russes ne sont pas tous en accord avec cette guerre pour éviter la polarisation (gentil et méchant). Parlez de la situation actuelle en évitant de projeter dans le futur les pires scénarios (guerre mondiale), surtout pour les jeunes anxieux.
4. Situer l’Ukraine et la Russie par rapport au Canada. Précisez que la guerre est dans un autre pays. Au besoin, montrer l’endroit sur une carte pour aider l’enfant à se situer dans l’espace. Préciser que le Canada (notre pays) n’est pas en guerre et qu’il a un rôle d’aidant (aide matérielle, aide humanitaire).
« La sensibilité face à la guerre peut varier d'un jeune à l'autre, selon des facteurs personnels. Par exemple, si un enfant ou un adolescent a déjà connu la guerre, s'il provient d'une famille réfugiée ou si le conflit prend place dans son pays d'origine. De plus, un jeune au tempérament anxieux est généralement plus sensible et empathique et peut avoir plus de difficulté à gérer l'incertitude. »
Sophie Leroux partage également quelques trucs pour aider à se sentir mieux et à développer l’empathie, le sens critique et le sens des valeurs dans le contexte de ces échanges :
- Accueillir les émotions sans jugement et les valider. Il est normal que votre enfant se sente triste, inquiet ou fâché. Avec les adolescents, explorez les émotions plus complexes (ex. : sentiment d’injustice, sentiment d’impuissance).
- Explorer ce que le jeune peut faire pour aider. À travers l’art : un dessin, un mot ou une chanson remplie d’amour et de courage que l’enfant peut envoyer « avec son cœur » aux enfants ukrainiens ou par le biais des médias sociaux. À travers un don : en jouet ou argent à des organismes d’aide humanitaire. À travers du bénévolat : dans les organismes d’aide.
- Explorer les valeurs familiales et les mettre en pratique : par exemple, l’importance de la paix, de l’entraide, de la bienveillance et d’apprendre à gérer les conflits. En pratique, la famille peut discuter de solutions souhaitables pour gérer les conflits et s’outiller sur la façon de le faire au quotidien. La famille peut également développer une attitude d’ouverture et d’entraide pour les jeunes de l’école ou du voisinage qui sont des réfugiés ou des immigrants.